« Lorsqu’on est attaché à ce système de protection sociale, le meilleur moyen de la défendre c’est de le faire évoluer »

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« Nous sommes dans un contexte extrêmement difficile sur le plan économique et qui pose des exigences humaines élevées. L’ensemble des partenaires sociaux qui sont autour de la table ont à gérer cette situation. A partir du moment où nous sommes confrontés les uns et les autres à ce type de situation, cette négociation était évidemment difficile. La moindre revalorisation, par exemple, est une mesure qui est indispensable, et en même temps pose problème sur le plan humain. Il est évident que ce type de négociation ne crée pas de l’enthousiasme : c’est une négociation responsable face à un environnement compliqué.

Regardons les choses de façon factuelle. Au départ de cette négociation, nous nous sommes fixé plusieurs objectifs : un objectif de court terme, les mesures conservatoires, et poser les bases d’une réflexion de long terme.

Sur les mesures conservatoires, nous avons fait des propositions de différente nature : la moindre revalorisation pendant trois ans concernant les retraités, mais également un investissement conséquent de la part des entreprises sur le chapitre des ressources. Puisque, après de multiples débats, nous avons accepté le principe de deux augmentations 2014 et 2015 du taux contractuel, c’est-à-dire qui non seulement d’un taux qui génère de la ressource pour les régimes mais qui crée des droits pour les futurs retraités. A cela il faut ajouter que nous avons confirmé qu’à partir de 2016 il y aurait une mensualisation dans le versement des cotisations aux régimes de retraites complémentaires. Et quand vous connaissez la vie quotidienne des entreprises en ce moment, en particulier dans le champ de la trésorerie, au-delà des chiffres, ce sont des investissements tout à fait significatifs. En mettant en œuvre ces mesures conservatoires, on atteint finalement des objectifs intéressants, puisque l’on repousse de façon significative, sur la base des hypothèses économiques dont nous disposons, le danger qui nous guettait à l’horizon 2017 et 2020 pour les deux régimes. Nous repoussons le problème de quelques années, voire plus, et l’on reconstitue de manière sérieuse les réserves.

Je rappelle que le déficit technique annuel en 2017, s’il n’y avait pas eu d’accord, aurait été de 8,6 milliards, avec accord il passe à 5,5 milliards. Et les réserves 2017, sans accord, c’était 21 milliards, c’est-à-dire 27 % des prestations, avec accord on passe à 46 milliards, c’est-à-dire 60 % des prestations.

Par conséquent, si cet accord était signé, l’objectif conservatoire de nous remettre dans une trajectoire raisonnable serait atteint.

Le deuxième objectif que nous nous étions fixé était de créer de bonnes bases pour le futur. L’article 8 de l’accord prévoit la mise en place d’un groupe de travail en deux temps et avec deux objectifs : un premier temps d’ici la fin 2013 qui est d’améliorer encore la performance de gestion des régimes, et à partir de 2014, le groupe de travail devra notamment partager des réflexions sur la convergence des paramètres des deux régimes, et devra évoquer l’opportunité ou non d’évoluer dans le domaine des retraites supplémentaires. De façon générale, l’enjeu étant : comment peut-on à terme créer un système dont les caractéristiques donneront aux retraites complémentaires une robustesse et une capacité d’adaptation à un environnement qui a profondément changé et qui changera profondément.

D’ailleurs, le message que nous devons tous partager, c’est que la protection sociale telle que nous l’avons connue a été créée et développée dans un environnement dont les caractéristiques ont profondément changé - et continueront de profondément changer. C’est-à-dire que lorsqu’on est attaché à ce système de protection sociale, le meilleur moyen de le défendre c’est de le faire évoluer.

L’autre point que je voudrais souligner en ce qui concerne nos trois organisations patronales, c’est qu’on voit bien à travers les chiffres que je viens de vous communiquer que les équilibres des régimes passent également par le structurel et les paramètres du régime général. Cela veut donc dire que si cet accord est signé, ce que nous souhaitons tous, les partenaires sociaux, comme ils viennent de l’exprimer, auront pris leurs responsabilités dans un contexte particulièrement difficile. Cette prise de responsabilités est un appel au gouvernement pour que lui-même, sans tarder, à l’occasion de la réforme du régime général, apporte des éléments de réforme structurelle, en particulier en agissant sur les paramètres. Si ce n’était pas fait, et c’est indiqué dans l’accord soumis ce soir à signature, cela nous conduirait inévitablement, à un terme que nous ne pouvons encore déterminer, à nous remettre autour de la table. Donc, face à l’effort qui est fait par les partenaires sociaux signataires ou non signataires - chacun ayant fait la preuve d’un dialogue respectueux et responsable, chacun apportant sa contribution – nous attendons de la part de l’Etat qu’il prenne lui-même ses responsabilités, en particulier sur les paramètres dont vous connaissez maintenant le calendrier : mise en place du groupe de travail des sages, consultations, résultats en juin, débat lors d’une nouvelle conférence sociale en juillet 2013 et décision. »