Le Medef vient de lancer un nouvel outil : l’Observatoire tendance Emploi Compétence, que Laurence Parisot a présenté lors de son point presse d’avril.Cet outil va permettre d’aller encore plus loin sur la recherche d’une meilleure efficience du marché du travail et de se poser des questions sur l’inadéquation constatée quotidiennement entre les besoins formulés par les entreprises en termes d’emplois, de recrutements, de compétences et la situation que vivent de nombreux demandeurs d’emplois désespérés car ils n’arrivent pas à trouver le job auquel ils aspirent.
"Cela fait des années que nous parlons de cette offre et de cette demande qui ne se rencontrent pas. Et nous nous sommes aperçus que nous manquions d’un outil statistique suffisamment vaste pour comprendre précisément où étaient les dysfonctionnements. Il existe bien sûr une étude annuelle intéressante publiée par Pôle emploi, l’étude « Besoin de main d’œuvre ». Mais elle ne permet pas de dire très précisément : « voilà, dans tel type d’entreprise on est prêt à recruter, par exemple dans les trois mois, des personnes qui ont telle qualification, telle formation ». Cela fait déjà un certain temps qu’avec différentes équipes au Medef, notamment Dominique Tellier, nous nous demandions comment apporter une contribution à l’ensemble des parties prenantes : que ce soit le gouvernement, des organismes publics comme Pôle emploi ou comme l’Unédic, et tous ceux qui veulent vraiment améliorer la situation de l’emploi dans notre pays.
Par conséquent nous avons, après beaucoup de travail, mis au point un observatoire. Il s’agit d’une étude qui aurait vocation à être menée soit tous les semestres, soit tous les trimestres. Nous déciderons au fur et à mesure de la collecte des données de la fréquence la plus pertinente. Et c’est une étude menée auprès d’un panel de près de 40.000 entreprises. A partir de ce panel de 40.000, nous avons eu 24.350 répondants. Cela veut dire qu’il y a 24.000 responsables des ressources humaines ou de recrutement d’entreprises qui ont accepté de répondre à des questions très précises sur les recrutements, sur les formations et sur les besoins. Nous pouvons du coup valablement et de manière totalement fiable, faire des extrapolations.
28% des entreprises ont cherché à embaucher au dernier trimestre 2012
La première vague d’enquête a été menée au 4e trimestre 2012. Il en ressort que 72 % des entreprises, au cours du dernier trimestre de l’année 2012, n’ont procédé à aucun recrutement. N’ont pas cherché à embaucher, n’ont pas eu l’opportunité ou le souhait d’embaucher. En revanche, 28 % des entreprises françaises ont cherché à embaucher.
Ce qui veut dire, et c’est là l’intérêt de l’outil, car nous pouvons extrapoler, qu’il y a eu 1 088 000 postes recherchés. Nous avons un nombre de chômeurs très élevé et, en même temps, nous savons que les entreprises ont recherché 1 088 000 personnes.
Si on veut résoudre les problèmes il faut se concentrer sur les dysfonctionnements, nous constatons qu’il y a 4 % des entreprises qui ont abandonné au moins une recherche – je dis au moins une parce que certaines entreprises évidemment souhaitaient recruter deux ou trois personnes. Mais il y a eu au moins 4 % des entreprises qui ont abandonné au moins une recherche. Ce qui veut dire, quand on l’extrapole, qu’il y a eu plus de 100 000 postes qui, finalement, se sont évaporés. Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
7% des entreprises ont eu des difficultés à recruter
Mais même chez les entreprises qui ont réalisé au moins une embauche – 976 000 donc beaucoup – 7 % disent l’avoir fait avec beaucoup de difficultés. Cela signifie qu’il y a eu 251 914 postes recrutés à partir de situations, de process qui ont fait perdre du temps, qui ont fait hésiter et qui ont rendu l’ensemble compliqué ou difficile à gérer. En clair, si nous voulons améliorer l’efficience du marché du travail, nous devons travailler sur ces deux champs : sur ceux qui ont abandonné parce que c’était vraiment trop compliqué , et sur ceux qui ont finalement réussi à embaucher mais avec beaucoup de difficultés à surmonter. C’est le premier type d’enseignement.
17% des entreprises ont l’intention d’embaucher au premier trimestre 2013
Deuxième type d’enseignement, mais à prendre avec prudence pour le moment parce que ce n’est que la première vague, nous avons mesuré les intentions d’embauches pour le premier trimestre 2013, ces intentions étaient en très net recul par rapport à ce qui a été la réalité du dernier trimestre 2012 puisque seulement 17 % des établissements ont dit vouloir embaucher, ce qui représentait 565 000 personnes, ce qui est très en-dessous évidemment de la réalité du dernier trimestre.
Cela ne veut pas dire que ces entreprises ne vont pas finalement aller plus loin ou que d’autres entreprises ne vont pas s’ajouter dans les chiffres du premier trimestre 2013, c’est ce que nous verrons à l’issue de la deuxième vague.
Pourquoi est-il intéressant de travailler là-dessus ?
Parmi les entreprises qui ont eu des difficultés à embaucher – 7% –, une proportion significative a cherché à mettre en place des solutions pour recruter. Lesquelles ?
Tout d’’abord de la formation. Soit de la formation par accompagnement, parrainage, etc. soit la mise en place d’une formation externe. Ont également été éventuellement utilisés des contrats courts. Ou des contrats en alternance.
On voit l’importance de la formation au moment du recrutement. On ne peut pas séparer la réflexion globale sur la formation de la question de l’embauche et du recrutement.
Quelques éléments aussi sur ceux qui ont abandonné le recrutement.
Il faut bien comprendre qu’une majorité de ceux qui ont abandonné le recrutement l’ont fait pour des raisons non conjoncturelles. Donc c’est à sortir de la situation économique difficile qui n’a concerné que 35 000 postes. Pour la plupart des postes, 53 000, ce qui n’allait pas c’est la difficulté à trouver les compétences attendues. C’est considérable et on voit bien que, là aussi, il y a des marges de progressions significatives à réaliser.
Pour beaucoup de ceux qui ont connu des difficultés de recrutement la plupart de ces difficultés sont liées au candidat lui-même. Soit parce que le savoir technique, métier, le savoir-faire d’une manière générale n’était pas là (22 % des cas, donc 236 000 postes), soit parce, et cela concerne 182 000 postes, parce qu’il y avait des enjeux de savoir-être. Le savoir-faire est majeur, mais le savoir-être est également significatif.
Au total quelques chiffres clefs : il y a eu 976 000 embauchent réalisées, 112 000 postes qui n’ont pas été pourvus et qui auraient pu être pourvus. 112 Et une annonce de 565 000 postes pour les 3 prochains mois.
Quels sont les métiers les plus recherchés ?
Il faut à la fois vouloir la ré -industrialisation de notre pays, il faut à la fois souhaiter une industrie très moderne, très performante mais il faut aussi penser service. Regardez quels sont les métiers qui sont les plus recherchés aujourd’hui : cuisinier. Je ne sais pas si c’est un effet ‘Master-chef’, cuisinier 71 000 postes. Agent de maîtrise dans l’hôtellerie et la restauration, 61 000 postes. Caissier, employé de libre-service, 54 000 postes. Jusqu’à vendeur, là vous avez les cinq postes les plus recherchés.
Avec ce type d’outil, nous allons pouvoir avoir des approches métiers très précises. Si on regarde par exemple une approche dans le métier du bâtiment. Vous avez là, ce que nous avons appelé « la fiche métier », qui donne très exactement la situation en termes de besoins ou de dysfonctionnements dans le secteur du bâtiment. Nous savons que sur le dernier trimestre 2012, le bâtiment, dans le gros et le second œuvre, a recherché 8 664 postes d’ouvriers qualifiés. Dans le béton, l’extraction, ou les travaux publics en général. Nous pouvons également dire grâce à cet outil où ces postes ont été recherchés. Principalement en Ile-de-France, en Pays-de-Loire, en Bourgogne, en Midi-Pyrénées. Donc nous avons une possibilité de localisation très précise. Nous pouvons voir, à partir du nombre de postes recherchés, les embauches qui ont été réalisées. Celles qui ont été réalisées sans difficultés et celles qui ont été réalisées avec difficultés et nous sommes en mesure d’identifier les raisons de ces difficultés. Elles sont en général liées à la connaissance technique, à des problématiques de polyvalence, d’expérience mais aussi à des caractéristiques liées au manque d’esprit d’entreprise, de compréhension sur ce qu’est la vie en entreprise. Et nous avons identifié les solutions mises en place qui ont été efficaces. Au total, nous identifions les postes non-pourvus et très précisément les postes non-pourvus pour des raisons non conjoncturelles. Cela veut dire très clairement qu’il n’est pas normal que ces postes n’aient pas été pourvus. C’est pénalisant pour l’entreprise, c’est douloureux pour le salarié, pour le candidat. Ce type de fiche, nous allons être en mesure de les établir trimestre par trimestre ou semestre par semestre pour tous les métiers possibles.
Voilà l’outil que nous avons mis au point. Il s’appelle TEC « Tendance Emploi Compétence ». Il est à nos yeux d’une puissance considérable. C’est un outil d’intérêt général. Si nous l’avons fait, c’est parce que nous constations, année après année, qu’aucune organisation publique, qui pourtant aurait vocation à mettre en place ce type d’instrument, ne l’a fait. C’est une façon de montrer que le Medef agit et a toujours chercher à le faire, en tout cas depuis que je suis là, dans un sens d’intérêt collectif. Je souhaiterais que cet outil puisse être un des instruments de base de la conférence sociale, si celle-ci consacre une partie de ses travaux à la formation. Quoi qu’il arrive, cet outil sera également utile à la préparation de la négociation sur l’assurance chômage puisque notre préconisation est de faire un lien entre la cotisation sur l’assurance chômage et la contribution qu’apportent les entreprises à la formation."